Synthèse :
Trois mois après le vote par referendum de son retrait de l'Union
européenne, le Royaume-Uni est confronté à de
sérieuses répercussions macroéconomiques : exclusion
des accords commerciaux de l'UE, fin de l'exonération des droits
de douane et de l'autoliquidation de la TVA pour les produits "made
in UK" importés sur le territoire communautaire, rétablissement
de barrières non tarifaires, prise de distance des Etats-Unis
vis-à-vis d'un partenaire en perte d'influence,... l'optimisme
ne semble pas même de mise chez les partisans du "Hard
Brexit" !
En sortant de l'UE, la 5ème
économie mondiale au classement FMI 2016 (devant la France)
s'est auto exclue du socle communautaire en matières de réglementations
douanières et fiscales et de partenariats commerciaux. En toute
logique, les importations du Royaume-Uni sur le territoire de l'UE
ne peuvent plus être considérées comme des opérations
intracommunautaires : le Royaume-Uni est passé du statut
d'Etat membre à celui de "pays tiers" à l'UE...
sans accords commerciaux préférentiels !
Le Premier ministre Theresa May, toujours fermement partisane d'une
sortie définitive de l'UE, souhaite donc garder sa place au
sein du marché européen via un "accord sur mesure",
dans les faits inconciliable avec le rejet du principe de libre-circulation
des personnes.
L'isolation économique du Royaume-Uni laisse perplexe ses principaux
représentants, et si certains pays ont renouvelé leur
allégeance à la couronne (Australie, Nouvelle-Zélande),
le patronat britannique s'inquiète sérieusement de
l'avenir des entreprises qui ont axé leur développement
sur le marché communautaire : pour conserver leur compétitivité
elles devront, selon certaines estimations, absorber une augmentation
globale de 4,8 milliards GBP de droits et taxes annuels (4,8%
de taxes européennes en moyenne, selon les règles de
l'OMC), et pour certaines filières industrielles (aérospatial,
automobile,
), un surcoût de 10 à 20% généré
par les barrières non tarifaires propres à ces
secteurs.
Pour enrayer ce problème majeur, le ministre des finances du
Royaume-Uni a annoncé qu'il envisageait d'abaisser le taux
de l'impôt sur les sociétés à 15%, contre
20% actuellement en Grande Bretagne.
Une situation mal anticipée par les pro-Brexit qui comptaient
sur le puissant allié américain pour stabiliser l'équilibre
économique du pays dans cette période de transition...
Mais Londres se heurte à un mur : en atteste la déclaration
très médiatisée du Président Obama en
avril dernier, selon laquelle sa sortie de l'UE relèguerait
le Royaume-Uni "en queue de peloton" en matière de
relations commerciales bilatérales. Une position que les
faibles chances de succès rapide des négociations pour
le Traité transatlantique (TTIP) UE/USA (cf. Atmosphère
Internationale d'octobre 2016) ne semblent pas ébranler.
Et les déconvenues s'accumulent...
En Asie, la Corée du Sud et le Japon ont également manifesté
leur hostilité vis-à-vis d'un Royaume-Uni indépendant
: refroidis par l'envolée du yen que le Brexit a presque instantanément
provoquée, les principaux exportateurs japonais qui profitaient
jusqu'alors d'une déflation favorable parlent de réviser
leurs activités sur le territoire britannique et de rediriger
une part de leurs investissements vers d'autres zones européennes. |
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Avis de l'expert : Fragilisé
par sa fracture récente avec l'UE et la volte-face des Etats-Unis,
le Royaume-Uni adopte une position encore floue sur sa politique post-Brexit.
La volonté affichée par Mme May de s'émanciper
du giron européen se confronte violemment au fameux "pragmatisme
économique" attribué non sans raison aux Britanniques...
Et même si la nouvelle "dame de fer" annonce à
qui veut l'entendre que le Royaume-Uni va accélérer
ses efforts dans la construction d'accords bilatéraux
avec l'Océanie, l'Inde ou le Mexique, qui peut réellement
prendre au sérieux cette "menace" de concurrence
directe de l'Union européenne à l'international ?
Toutefois, même si Bruxelles se défend de vouloir recoller
les morceaux, il apparaît probable que les institutions européennes
accepteront de négocier des accords commerciaux préférentiels
bilatéraux afin de préserver la stabilité
économique et financière... et de ne pas condamner la
porte d'entrée de l'UE en cas de revirement politique outre-Manche
dans les prochaines années.
L'UE bénéficie d'ailleurs actuellement d'une position
de force qui lui donne un avantage dans les futures négociations,
à condition que les Etats membres ne se déchirent pas
"aussi" sur ce sujet là ! Le contexte international
et la position de Londres en matière de politique migratoire
est de ce point de vue un facteur aggravant !
Pour le moment, ce bras de fer politique joue en défaveur
des opérateurs du commerce transmanche. Les répercussions
opérationnelles et douanières sur les supply chains
qui passent par le Royaume-Uni représentent un risque potentiel
pour les acteurs du commerce international : si la plupart attendent
de voir dans quel sens le vent va tourner, nombreux sont déjà
ceux qui entreprennent ou envisagent déjà de modifier
leurs schémas de gestion des flux d'approvisionnement et/ou
de distribution...
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