Atmosphère Internationale
la lettre de veille stratégique du commerce international
 Thème TRANSPORT INTERNATIONAL / LOGISTIQUE
 Pays CHINE / MONDE  Date août 2013

Fret maritime : la Chine inaugure la route du Nord-Est !

Synthèse : Le 8 août dernier, un porte-conteneur est parti du port de Dalian, au nord-est de la Chine, à destination de Rotterdam... via l'Arctique ! C'est le premier navire de fret à emprunter cette route maritime qui passe par le détroit de Béring et contourne la Russie par le nord, en longeant les côtes de la Sibérie.

Le bâtiment appartient à Cosco, la plus grande compagnie maritime chinoise et 4ème armateur mondial pour le transport de conteneurs. Une première, rendue possible grâce à un tour de force diplomatique de la Chine qui a obtenu le statut d' "observateur permanent" du Conseil de l'Arctique.

Le principal intérêt que représente cet itinéraire pour les armateurs de porte-conteneurs est clairement d'ordre économique : il permettrait à la fois de réduire la distance et le temps de navigation entre l'Asie et les ports de l'Atlantique et d'éviter le Canal de Suez.

Jusqu'à présent, la route maritime de l'Arctique n'était ouverte à la navigation que pendant les 4 mois d'été. Or, réchauffement climatique oblige, la période d'eau libre tend à s'allonger d'année en année...
Le trafic maritime sur cette route a d'ailleurs été multiplié par 4 en un an ! Toutefois, les quelque 200 bâtiments qui auront croisé dans les eaux polaires d'ici fin 2013, ne représentent quasiment rien par rapport aux 17 000 qui ont choisi la sécurité du Canal de Suez en 2012...

Anticipant la montée en charge des flux maritimes dans cette zone, l'Organisation Maritime Internationale prépare pour 2015 un code de la navigation en Arctique afin d'établir des règles communes.
Avis de l'expert : Cosco a ouvert la voie du Nord-Est pour le transport des marchandises conteneurisées : les autres armateurs de porte-conteneurs vont-ils pour autant s'engouffrer dans son sillage ?

90% des flux export de la Chine utilisent le fret maritime !

Nous savons que l'effondrement des volumes de fret au départ d'Asie, dû au ralentissement des échanges mondiaux, a fortement impacté les tarifs des compagnies maritimes à la baisse ces dernières années (cf Atmosphère Internationale de mai 2013). La plupart d'entre elles ont donc choisi de limiter la vitesse des navires (slow steaming) pour optimiser les coûts en carburant : le "transit time" moyen entre Shanghai et Le Havre est aujourd'hui de 30 à 35 jours, contre 25 jours il y a 5 ans !

Les délais d'acheminement étant encore plus longs au départ du nord de la Chine, on comprend bien l'intérêt des compagnies maritimes pour la route Arctique, plus courte de 5 000 km et présentant un gain de temps potentiel d'une dizaine de jours en moyenne... "potentiel" seulement !

Car si le passage du Nord-Est peut être emprunté sur des périodes de plus en plus longues du fait de la fonte des glaces, ce dont on ne peut objectivement se réjouir sur un plan global, il reste aléatoire et risqué pour des géants des mers chargés au maximum de leur capacité et très peu manœuvrables... (cf ACTus)

De plus, la réduction des coûts de carburant pourrait être fortement contrebalancée par des dépenses importantes en termes d'équipements spéciaux ou encore de primes d'assurance, sans parler d'un éventuel péage comme dans le Canal de Suez.

Il n'y aura donc vraisemblablement pas de transfert massif et immédiat des flux maritimes vers l'Arctique : pas temps que cette voie ne sera pas suffisamment sécurisée pour permettre un passage régulier en vitesse de croisière des navires de fret.

D'autant que d'autres enjeux stratégiques, sans doute plus considérables encore, entrent en ligne de compte : la fonte des glaces autour du cercle polaire arctique ne facilite pas seulement la navigation, elle rend également plus facile l'exploitation de gigantesques réserves d'énergies fossiles...

En ouvrant cette nouvelle route maritime au commerce, la Chine cherche clairement à se positionner dans la région en vue d'en tirer un profit direct... Ce que ne voient évidemment pas d'un bon œil la Russie (cf ACTus), le Canada et les Etats-Unis, déjà en conflit sur l'accès et la gestion de cette zone !
Imprimer  L. CARPANO / D. CAMMARANO
Source(s) : Divers media (août 2013)
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